Complexite descriptive et theorie des modeles finis : le point de vue d'un theoricien des modeles par Bruno POIZAT, Qaragandy Memlekettik Universiteti et Institut Girard Desargues J'ai deja fait il y a quelques temps, et en ce lieu meme, une conference avec un titre identique. Mais comme j'avais devant moi un public de mathematiciens qui ne connaissaient pas leur alphabet jusqu'aux lettres N et P , celle que je vais donner ici sera de nature bien differente. Comme tout le monde ici le sait, la question P =? NP est un probleme de nature combinatoire dont la solution se fait attendre ; son importance se manifeste par le grand nombre de facons differentes dont on peut le formuler. Une de ces facons a ete decouverte il y a quelques trois lustres par Fagin, qui a traduit la question voisine NP =? co-NP en termes de separation d'enonces existentiels et universels du second ordre sur des structures finies (j'espere egalement que les participants a cette rencontre sont familiers de la notion de formule). Cela a donne l'espoir d'une approche modele-theorique du probleme NP =? co-NP, et Fagin et ses fideles ont produit differents resultats de separation d'enonces existentiels et universels a quantifications monadiques (i.e. ou les predicats quantifies sont des relations unaires seulement) ; bien que le contraire soit regulierement affirme dans les introductions des articles ou ils sont exposes, il ne me semble pas qu'ils aient la moindre signification en terme d'algorithmie. J'exposerai (brievement) les fondements de cette approche, et je tordrai le cou a une legende, qu'on aime raconter dans les introductions des articles cites, qui veut que la theorie des modeles du premier ordre ait un caractere "local", par opposition a la theorie des modeles du second ordre. Ce qui est exact, c'est que les resultats n'ont ete obtenus que dans des contextes ou elle avait bien ce caractere local, quel que soit le sens qu'on donne au mot "local" pourvu qu'il soit preserve par l'adjonction de predicats unaires ; par contre, pour ce qui est des structures finies, la logique du second ordre est interpretable dans celle du premier ordre (c'est a peu pres evident), si bien qu'on ne peut esperer de methode modele-theorique generale pour separer ces langages : ce qui les distingue, c'est la taille des objets manipules, et la "logique" n'apporte pas une formulation du probleme bien differente de l'originale ! J'enoncerai des theoreme de Gaifman, de Hanf, et de Hanf-ordonne, qui precisent ce qu'on entend par "local". Un autre phénomène frappant, c'est que ces contextes favorables ont une limite a l'infini, c'est-à-dire produisent des structures infinies ayant des propriétés structurelles particulierement simple, disons stables ou O-minimales. Cela ne fait que confirmer le sentiment que l'infini est plus accessible que le fini arbitrairement grand, et que si le fini reste cahotique, sans s'organiser a l'infini, la situation est sans espoir (de meme que P =? NP !). Mon expose sera une introduction au sujet pour ceux qui ne le connaissent pas encore, et, je l'espere, une base de discussion pour les connaisseurs.