Beaux ordres et graphes.
Un bel ordre (X,≤) est une
relation d'ordre ≤ sur X
(càd. réflexive, antisymétrique et transitive)
telle que,
de toute suite infinie x0,
x1, x2, .... d'éléments de X, on peut extraire deux
indices i<j tels que xi≤xj.
Un certain nombre d'ensembles infinis en mathématiques
discrètes s'avèrent être muni d'un bel ordre
intéressant, qui induit d'importantes conséquences tant
du point de vue mathématique que du point de vue algorithmique.
C'est le cas d'un des plus gros théorèmes de
théorie des graphes : le théorème des mineurs, de
N. Robertson et P. Seymour (ex-conjecture de Wagner). L'objectif de ce
sujet est d'illustrer ce propos par des exemples et
éventuellement des contre-exemples. Les trois
théorèmes ci-dessous sont très
représentatifs :
- Lemme de Higman (version ensembles, preuve
abordable) : Soit X un
ensemble muni d'un bel ordre ≤, et X<ω
l'ensemble des parties finies sur X
muni de la relation A ≤ B
s'il
existe une injection f de A dans B
telle que ∀ a ∈ A, a ≤ f(a).
Alors cette relation ≤ est un bel
ordre sur X<ω.
- Théorème de Kruskal
(preuve abordable) : La relation de mineur topologique est un bel ordre
sur les arbres finis.
- Théorème des
mineurs de Robertson et Seymour (> 600 pages de preuves !) :
La relation de mineur est un bel ordre sur les graphes finis.
Les questions ci-dessous peuvent vous guider :
- Donner quelques précisions sur la notion de bel ordre. En
particulier il existe d'autres caractérisations, par exemple :
- ordre tel que de toute suite infinie, on peut extraire une
sous-suite croissante,
- ordre ne contenant ni antichaîne infinie, ni suite
infinie strictement décroissante.
- Donner des exemples et des contre-exemples simples de beaux
ordres. Par exemple est-ce
que Nk muni de l'ordre produit classique
(ordre composante par
composante) est un bel ordre ?
- Présenter les trois théorèmes cités,
avec éventuellement des preuves (sauf Robertson et Seymour,
à moins d'une idée fulgurante !).
- Le lemme de Higman existe aussi en version mots : soit Σ un alphabet muni d'un
bel ordre ≤, on peut
l'étendre en une relation sur Σ* (mots finis)
où pour deux mots u=u1...up et v=v1...vq,
on a u ≤ v s'il existe f injection de {1,...,p} dans {1,...,q} telle que ∀
i, ui ≤ vf(i),
alors cette relation est un bel
ordre sur Σ*. Montrer qu'on peut déduire
rapidement la version ensembles
de la version mots, et
inversement.
- Qu'est-ce qui fait dire qu'une classe de graphes finis est close
par mineur si et seulement elle peut se définir par une famille
finie de mineurs interdits ?
- Montrer que la relation de sous-graphe connexe n'est pas un bel
ordre sur la classe des arbres finis.
- Montrer que la relation de mineur topologique n'est pas un bel
ordre sur la classe des graphes finis.
- Seymour a conjecturé que "tout graphe infini
dénombrable est un mineur strict de lui-même".
Précisez bien le sens de l'assertion et montrer qu'elle implique
le théorème des mineurs.
Remarque : dans la
littérature, la définition de bel ordre fait parfois
appel à une relation de préordre (juste réflexive
et transitive) plutôt que d'ordre. Cela explique que dans la
littérature anglaise, on se réfère souvent aux
well-quasi-orders ou WQO (quasi-order = préordre). Ceci-dit,
quasiment tout le temps, les théorèmes et preuves restent
identiques pour les deux définitions. D'autre part quasiment
tous les exemples de beaux ordres étudiés sont des
ordres.
Pour finir, remarquer que tout ordre est un préordre et tout
préordre peut se ramener à un ordre en quotientant par la
relation d'équivalence x ∼ y
ssi x ≤ y et y ≤ x. Il n'y
a donc pas lieu de
s'inquiéter ici de la définition choisie.
Quelques références (pas
exhaustif).
- Graph Theory, livre de
R. Diestel, Springer (2000).
Dans le chapître 12, les sections 12.1 et 12.2 donnent des
preuves et 12.5 discute du théorème des mineurs. Les
questions 6, 7 et 8 correspondent à des exercices de ce
chapître.
- Graph
Minor Theory, article de L. Lovasz, Bulletin of the AMS 43 (2005).
C'est une petite synthèse à propos du
théorème des mineurs.
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